La Forteresse

La pointe du Nord-Médoc dessinée par la rencontre de la Gironde et de l'océan constitue un emplacement stratégique idéal pour contrôler l'approche et l'entrée de l'estuaire.
Cette situation a été bien évidemment exploitée par les Allemands qui ont fait de ce territoire une place fortifiée et lourdement armée à des fins de blocus, le cas échéant, mais également pour contrôler cette porte d'entrée vers la base sous-marine de Bordeaux-Bacalan.


Deux lignes de fortifications

Présentée d'une manière synthétique, la ligne de fortifications occupant le cordon dunaire, face à l'océan entre la Pointe de Grave et Soulac, présente une plus grande densité de positions que sur la partie sud. Il s'agit de points d'appui lourdement armés dont l'implantation est justifiée par la proximité de l'estuaire. Cette ligne de défenses côtières va jusqu'à l'enracinement de la jetée nord où un projecteur sous abri et une casemate de type 506c, armée de sa pièce 4,7 cm Skoda, permettent de protéger l'accès au port Bloc.
Pour compléter le dispositif, deux pièces de 28 cm KBK sur voie ferrée (Eisenbahnbatterie 721) sont placées entre l'océan et la Gironde dès 1942.  

Côté Gironde, un alignement de postes de DCA (Flak) prend place sur la rive estuarienne, de port Bloc à la zone portuaire du Verdon. Cette défense antiaérienne a pour objectifs la protection des deux zones portuaires et des réservoirs de carburant qui sont construits au môle d'escale, ainsi que celle de l'estuaire contre le largage de mines par l'aviation alliée.


Implantation des positions défensives


Un camp retranché

Nous savons que, dès 1941, l'occupant allemand avait prévu de maintenir le contrôle de l'entrée de l'estuaire, même en situation de repli face à une attaque terrestre par le sud. Un projet de fossé antichar reliant l'estuaire à l'océan, barrant ainsi le sud de la pointe de port Neyran à Soulac a donc vu le jour. Initialement, ce fossé devait être bordé par une succession d'ouvrages fortifiés à l'image des positions implantées sur le cordon dunaire, mais l'ampleur des travaux semble avoir amené l'occupant à revoir son projet à l'économie (matériaux et main-d'oeuvre) pour se limiter à une ligne de postes de mitrailleuses en tobrouks ou en nids de rondins.
Partant de l'estuaire, le creusement du fossé antichar n'a pu être achevé et son tracé s'arrête aux Cousteaux, à Soulac. Deux hypothèses sont aujourd'hui avancées afin de justifier l'interruption de ces travaux : Pénurie de carburant pour le fonctionnement des engins et problèmes rencontrés lorsque le creusement a atteint des zones sablonneuses et instables...

Enfin, plus au sud, une ligne d'avant-postes partant de la Gironde et rejoignant Montalivet, après avoir contourné Saint-Vivien et Vensac par l'est, constitue le Vorfeld (terrain avancé). Ces positions représentent le premier niveau de résistance pour contrer une attaque terrestre.


Une station radar

Ce camp retranché abrite une importante station radar de la Luftwaffe baptisée Vogel (oiseau). Son site principal est la dune du terrier Saint-Nicolas, sur la commune du Verdon, et elle dispose de deux annexes, l'une située juste au nord de la batterie des Arros et équipé d'un radar de type Mammuth  et l'autre,  installée au nord du lieu-dit "Les Cantines".
Cette position, numérotée Gi305, sera le lieu de repli et de résistance acharnée du bataillon Narvick de la Kriegsmarine, lors des combats d'avril 1945.


La Festung Gironde sud

Le statut de forteresse "festung" sera attribué au groupe de fortifications concentrées sur la pointe de Grave et défendant l'estuaire de la Gironde sur une directive d'Hitler en 1944. Le surclassement des grands ports est ordonné afin de renforcer leur niveau de protection et les estuaires s'en trouvent aussi concernés. 
C'est ainsi que la pointe nord du Médoc est devenue la "Festung Gironde Mündung Süd(Forteresse Gironde Rive Sud).
Enfin, il convient d'ajouter que sur la rive nord de l'estuaire, le secteur de Royan a lui aussi été impacté par ces mesures de renforcement et son ensemble de fortifications a constitué la "Forteresse Gironde nord". Ainsi, deux ensembles fortifiés et lourdement armés se faisaient face et barraient l'entrée de l'estuaire de la Gironde.