Une cuisine annexe de la batterie des Arros...

Un nivellement de la dune a fait apparaître des carreaux bitumeux, méticuleusement alignés sur le sable, sans qu'aucun élément de maçonnerie ne suggère la présence d'une construction...
C'est à l'occasion de travaux d'entretien du site que nous avons mené cette action, afin d'empêcher l'ensablement de certaines structures. 
Rapidement, des carreaux noirs bitumeux, typiques du revêtement utilisé en finition dans les bunkers, sont apparus. Les premiers exemplaires dégagés semblaient avoir été abandonnés mais les suivants respectaient un alignement parfait et des intervalles réguliers. Ces carreaux ont été posés directement sur un sable préalablement nivelé pour constituer une terrasse. Une fouille périphérique nous apprendra que la surface à carreler a été dans un premier temps bien délimitée et préparée, puisqu'elle a été ceinturée par des poutres de bois pour la stabiliser.


Une découverte inattendue...

Ainsi, une petite terrasse mesurant 3,70 m sur 2,70 m a été dégagée. Sur l'un des côtés, les carreaux ne sont plus de niveau, ni alignés, mais la présence de poutres délimitant l'ensemble confirme que la structure est complète.
Situés à peu près dans un angle de cette terrasse, des restes appartenant à un four ont été observés. Il s'agit d'un ouvrage maçonné en U, monté en briques et scellé sur les carreaux.
On note la présence de deux cornières métalliques maintenant l'écartement des deux côtés parallèles. Un boisseau en terre cuite ayant pour dimensions intérieures 17 cm par 17 cm ferme le U. Il ne s'agit ici que d'un vestige, mais on sait, par l'observation des carreaux brûlés situés en son centre, que ce moyen de cuisson a été utilisé. 


Plan et vues de l'ouvrage




Une seconde cuisine ?

Cette découverte se situe sur la partie sud de la batterie et on sait que le baraquement des cuisines se trouvait dans la moitié nord du site. Cette installation que l'on sait postérieure à la construction des différents ouvrages constituant la batterie Gi307 (casemates et bunkers divers), c'est-à-dire à partir de 1943, n'aurait-elle pas eu pour but de créer un second point de préparation des repas pour le personnel en poste sur cette partie du site ?
Les fouilles réalisées n'ont pas révélé d'indices quant à une éventuelle couverture protégeant cet aménagement. Quelques fragments de fibrociment ont été trouvés en couche archéologique mais leur nombre insuffisant n'est pas révélateur. De plus, aucun élément de structure susceptible de supporter une toiture n'est à signaler...
Les poutres, au nombre de trois, trouvées en bordure de la terrasse semblent bien avoir joué un rôle dans la stabilisation de la couche de sable avant la pose du carrelage, comme évoqué en début de cet article. Elles n'auraient donc jamais été utilisées comme poteaux porteurs.
Certains carreaux portent des traces de peinture rouge. Ces traces dessinent un contour d'éléments carrés et laissent penser que du mobilier utilisé sur cet espace a été peint après son positionnement. La couleur rappelle l'apprêt antirouille utilisé par les Allemands sur les éléments métalliques des bunkers...      


Sur la photo ci-dessus, deux traces de peinture rouge sont visibles à proximité de l'ouvrage en briques. Ci-dessous, une vue rapprochée de ces traces laissées sur les carreaux. 

Ci-dessus, l'une des poutres en bois ceinturant une partie de la terrasse.
Cette découverte, sans être spectaculaire, nous apporte des éléments complémentaires sur l'occupation du site et son évolution. Rares sont les découvertes de cet ordre qui enrichissent néanmoins nos connaissances de ces lieux et la situation exceptionnelle de ce site, particulièrement protégé de l'érosion côtière, doit une nouvelle fois être mise en avant. 

Comme lors des dégagements déjà opérés en différents points du site, nous avons encore trouvés des bouteilles d'eau Perrier. Ces bouteilles, trouvées en couche, semblent confirmer le goût prononcé des soldats allemands pour cette eau de source...